<440> ment de Madame de Bentinck projeté et prêt d'être achevé. La France croit qu'à la suite de cet accommodement il n'y aura rien de plus aisé que de faire consentir le Danemark à cette alliance, mais je ne m'en flatte pas, à cause que Messieurs de Bernstorff et de Berckentin sont plus portés pour l'Angleterre et l'Autriche que pour la France et la Prusse. Cependant je ne puis qu'applaudir aux bonnes intentions des Français et faciliter la chose de mon côté autant qu'il dépend de moi.

Quant aux ministres étrangers, Milord gardera les bienséances et l'extérieur d'amitié avec tous ensemble. Cependant il ne sera confident qu'avec celui de Suède, qui est de toutes les cours là celle avec qui nous sommes le plus unis. B peut apprendre des nouvelles par M. Scheffer; c'est un homme à projets, et il faut l'arrêter dans ses imaginations plutôt que de l'y fortifier.

Milord m'enverra ses relations deux fois par semaine, il gardera son chiffre soigneusement sous sa clef; Knyphausen1 peut chiffrer les relations ordinaires, mais si M. de Puyzieulx lui fait quelques ouvertures, il chiffrera ces passages lui-même. S'il arrive quelque changement dans le ministère, il tâchera d'en approfondir la raison et il fera le caractère du nouveau ministre, y ajoutant un raisonnement sur le changement que le nouveau ministre pourra produire dans les affaires et principalement dans celles qui me regardent. Il sera attentif pour être instruit des insinuations malicieuses que les Autrichiens, Anglais et Saxons font contre moi; il n'en témoignera aucune méfiance aux Français, mais sans faire semblant de rien et par manière de conversation il tâchera d'en montrer la fausseté et la malignité que renferment ces propos. Il fera ce qui dépendra de lui pour s'attirer la confiance des ministres; il ne se rebutera point par les manières brusques du sieur Saint-Séverin ni de l'humeur de M. Puyzieulx; il tâchera de flatter en toutes les occasions l'amour-propre de ces ministres et de la nation et il tâchera de leur insinuer et persuader dans toutes les occasions de la déférence que j'avais pour les avis et conseils du roi de France, et que son amitié était sans prix pour moi, et il leur fera cependant remarquer que les intérêts de la France et de la Prusse sont les mêmes. B trouvera le maréchal de Belle-Isle très bien intentionné pour nous, M. Puyzieulx et Saint-Séverin de même, la maîtresse encore, les Paris de même, le duc de Noailles faiblement, le d'Argenson pas trop bien. Il trouvera en France les partisans de la Saxe, dont il faut qu'il se défie; il connaîtra mieux la disposition des autres, quand il aura fait quelque séjour à Paris; au reste, je m'en remets à son habileté et à sa sagesse qui ne manqueront pas de le faire réussir dans une cour où on estime les honnêtes gens.

F r.

Eigenhändig.



1 Knyphausen begleitete den Gesandten als Legationsrath.