<557>sente de la Suède de faire proposer sous main par le parti russien une alliance avec la Russie, l'Angleterre, la Saxe, l'Autriche et la Hollande, en relevant beaucoup les avantages que le royaume de Suède saurait retirer d'une alliance si puissante, par où elle serait peut-être un jour à même de ravoir la partie de la Poméranie qu'elle avait été obligée de céder à la Prusse par la paix de Stockholm. L'on m'a averti d'ailleurs que le roi d'Angleterre était déterminé d'employer tout en argent pour faire réussir ce projet et même de ne rien ménager en offres d'argent au roi de Suède, dont on savait que les revenus ordinaires n'étaient pas bien forts, pour l'attacher à l'Angleterre et à ses alliés. Quoique je compte trop sur la droiture et sur la pénétration du roi de Suède, pour que je dusse craindre qu'il se laissât jamais entraîner dans un système si pernicieux, cependant, comme la constitution du royaume de Suède est assez particulière, je crois que l'avis qu'on m'a donné là-dessus et qui, comme je vous ai [dit], m'est venu de très bon lieu, n'est pas à négliger. Vous devez en faire confidence à M. de Contest, de même, si vous le croyez convenable, au marquis de Puyzieulx, en ajoutant, quoique dans des termes bien modérés et de manière à ne les point choquer, combien il nous importait de veiller exactement sur les grands desseins de la cour de Vienne et du roi de l'Angleterre; qu'il n'était pas bien difficile de pénétrer les vues qu'ils ont par toutes ces démarches, en attendant qu'ils tâchent à nous endormir par leurs assurances pacifiques, et quoiqu'il ne parût guère à craindre que leurs vues sur la Suède sauraient avoir du succès, il y avait cependant à considérer que l'Angleterre et la Russie avaient un parti considérable, que l'argent était un grand appât pour la nation, et, comme les revenus du Roi étaient assez modiques, je ne savais même si je pouvais tout-à-fait répondre que de grandes offres en argent de la part de l'Angleterre ne sauraient pas faire de l'impression sur son esprit, surtout si l'on connivait que le marquis d'Havrincourt poussât à bout ce Prince par ses façons d'agir envers lui.

Je remets à votre prudence de vous exprimer sur tout ce que dessus d'une manière qui ne choque point la délicatesse des ministres de France, mais qui cependant leur fasse quelque impression.

Au reste, les soupçons que j'ai eus sur les vues que la cour de Vienne porte sur la couronne de Pologne, qu'elle voudrait assurer au prince Charles de Lorraine après la mort du Roi régnant, viennent de m'être confirmés par mes lettres de Dresde, où mon ministre a eu l'habileté de tirer d'un des confidents du comte de Brühl que, malgré les engagements que le roi de Pologne venait de prendre avec les Maritimes, il était piqué au vif contre la cour de Vienne, depuis qu'il avait découvert ses menées en Pologne et le dessein qu'elle avait d'assurer la couronne, après la mort du Roi régnant, au prince Charles de Lorraine, ou, en cas que cet évènement n'arrivât pas si tôt, de faire en sorte que la couronne tombât en partage à un des Archiducs; qu'en