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528. DE VOLTAIRE.

Ferney, 31 août 1775.

Sire, je renvoie aujourd'hui aux pieds de Votre Majesté votre brave et sage officier d'Étallonde Morival, que vous avez daigné me confier pendant dix-huit mois. Je vous réponds qu'on ne lui trouvera pas à Potsdam l'air évaporé et avantageux de nos prétendus marquis français. Sa conduite, et son application continuelle à l'étude de la tactique et à l'art du génie, sa circonspection dans ses démarches et dans ses paroles, la douceur de ses mœurs, son bon esprit, sont d'assez fortes preuves contre la démence aussi exécrable qu'absurde de la sentence de trois juges de village, qui le condamna, il y a dix ans, avec le chevalier de La Barre, à un supplice que les Busiris n'auraient pas osé imaginer.

Après ces Busiris d'Abbeville, il trouve en vous un Solon. L'Europe sait que le héros de la Prusse a été son législateur; et c'est comme législateur que vous avez protégé la vertu livrée aux bourreaux par le fanatisme. Il est à croire qu'on ne verra plus en France de ces atrocités affreuses, qui ont fait jusqu'ici un contraste si étrange et si fréquent avec notre légèreté; on cessera de dire : Le peuple le plus gai est le plus barbare.

Nous avons un ministère très-sage, choisi par un jeune roi non moins sage, et qui veut le bien. C'est ce que V. M. remarque dans sa dernière lettre, du 13. La plupart de nos fautes et de nos malheurs sont venus jusqu'ici de notre asservissement à d'anciennes coutumes honorées du nom de lois, malgré notre amour pour la nouveauté. Notre jurisprudence criminelle, par exemple, est presque toute fondée sur ce qu'on appelle le droit canon, et sur les anciennes procédures de l'inquisition. Nos lois sont un mélange de l'ancienne barbarie mal corrigée par de nouveaux règlements. Notre gouvernement