<315> vieux tableau bruni et à demi écaillé. Permettez-moi donc, ma chère sœur, d'employer les ratures et les corrections, autant que je pourrai y mettre du temps, pour que les bagatelles que vous me demandez soient moins informes, et pour que mes petits ne se présentent que bien léchés devant vous. Je fais mille vœux pour l'entier rétablissement de votre santé, vous priant de me croire avec une tendresse à toute épreuve, ma très-chère sœur, etc.

307. DE LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Le 28 novembre 1755.



Mon très-cher frère,

Je ne saurais vous dire, mon très-cher frère, la joie que m'a causée votre précieux souvenir. Vous avez eu soin de satisfaire à la fois mes sens et mon cœur. J'ai eu l'honneur de recevoir trois de vos lettres, les raisins, et la musique. Que ne vous dois-je point pour tant de marques de bonté! J'en suis pénétrée; ma reconnaissance surpasse toute expression. Je voudrais pouvoir vous dépeindre mes pensées, et je ne le puis. Mon cœur parle, mais il ne peut articuler ce dont il est rempli. Quel embarras! Ce n'est pas la première fois que j'y suis. Vous joignez à tant d'autres vertus, mon très-cher frère, celle de la modestie. Oserais-je vous dire que vous péchez par un vice contraire à ceux des autres poëtes? Ils sont trop satisfaits de leurs ouvrages, et vous l'êtes trop peu. Nous avons lu vos poésies en compagnie de deux Français, dont l'un est poëte, qui en ont été enthousiasmes. A force d'interruptions admiratives, il nous a fallu trois jours pour les lire. Ils ont surtout admiré votre éloquence et la pureté de