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de donner à entendre que le premier devoir d'un État c'était de tenir exactement sa parole, que la Suède ayant des devoirs à remplir, en qualité de garante, elle était obligée de le faire, puisqu'on le lui demandait; que, jusques là, on ne lui avait demandé simplement que de reconnaître le cas, ce qu'elle avait fait, mais que, si on la requérait pour avoir des troupes, il fallait les donner, par la raison qu'il ne faut jamais manquer à ses engagements.

Ces lettres remarquent encore qu'on avait observé que depuis l'arrivée du susdit courrier il était incroyable avec quelle insolence le gros du parti dominant raisonnait dans les places publiques contre moi et contre l'Angleterre, et qu'on remarquait des émissaires apostés qui prêchaient, pour ainsi dire, la croix, principalement contre moi, ne parlant que de la gloire et de l'honneur de la nation, et que, selon eux, le temps était venu où la Suède pourra reprendre ce qu'on lui avait ôté de provinces en Allemagne du temps de Charles XII, et faire des conquêtes nouvelles.

Voilà ce que j'ai trouvé nécessaire de vous communiquer, vous verrez quel usage vous pourrez en faire auprès du ministère anglais, pour leur faire comprendre de quel bon effet une escadre anglaise dans la Baltique1 serait pour imposer à toutes ces insolences et aux brigues des cours alliées de Vienne et de Versailles dans ces contrées-là, s'il n'y avait cette malheureuse division en Angleterre qui fait manquer tout.

Au reste, j'ai appris avec bien de la satisfaction ce que vous me marquez au sujet de la résolution que le ministère a prise d'envoyer deux vaisseaux de guerre vers Emden pour bloquer le port, en cas que les Français s'en dussent rendre maîtres, pour ne pas s'en servir de retraite pour les armateurs. Jusqu'à présent, tout est encore tranquille dans cette province, et aucun Français n'y a mis le pied. D'ailleurs mes ordres positifs sont à la garnison d'Emden qu'au cas que l'envie prît aux Français d'en vouloir à cette ville, de la défendre jusqu'au dernier homme et de se servir de tous les moyens propres pour conserver la ville contre les entreprises des Français.2 Mais comme les Français sauront s'aviser encore d'envahir la province d'Ost-Frise, il serait toujours fort convenant et utile pour la cause commune, si le ministère réalisait ce qu'il s'est proposé par rapport à l'envoi des deux vaisseaux de guerre, et je suis certain qu'alors jamais les Français n'oseront toucher à la ville d'Emden.

Quant à nous autres ici, je me suis arrangé de la sorte devant la ville de Prague que je commencerai peut-être demain de faire bombarder cette ville,3 afin de brûler les magasins de vivres et de munitions qu'il y a, et je verrai alors à quoi la garnison se déterminera. Je me flatte d'avoir plus tôt fait avec la ville de Prague, qu'on n'aura fixé en Angleterre l'administration.

Federic.

Nach dem Concept.



1 Vergl. Bd. XIII, 609; XIV, 551.

2 Vergl. S. 15. 48.

3 Vergl. S. 90.