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1173. AU MINISTRE D'ÉTAT BARON DE MARDEFELD A SAINT-PÉTERSBOURG.

Potsdam, 20 août 1743.

Je viens de recevoir votre relation du 6 de ce mois,1 et ce n'a pas été sans quelque surprise que j'y ai vu tout ce qui s'est passé au sujet de l'affaire qui fait à présent tant de remue-ménage là où vous êtes.

L'occasion me paraît néanmoins trop naturelle et trop belle pour que vous n'en dussiez pas profiter pour ruiner à présentle parti autrichien, anglais et saxon dans l'esprit de l'Impératrice et de ceux qui sont accrédités auprès d'elle, et pour les mettre au contraire tout-à-fait dans mes intérêts. C'est pourquoi ma volonté est que vous devez mettre tout en usage pour insinuer adroitement dans l'esprit de l'Impératrice, et de ceux qui ont du crédit, le malin vouloir des cours de Vienne et de Londres, qui ne souhaitent que de voir culbutée l'Impératrice, seulement pour faire remonter au trône le prince Iwan et pour disposer alors de la Russie selon leurs vues; que l'Impératrice a trop de preuves de mon amitié personelle et de la sincérité de mes sentiments envers elle, ayant fait voir toujours combien ses intérêts me sont chers et combien peu je me suis mêlé des affaires de la maison de Brunswick.

Vous témoignerez même à l'Impératrice, ou à Lestocq, la parfaite obligation que je lui ai de l'ouverture qu'elle m'a fait faire par le sieur Lestocq, touchant l'affaire en question; qu'elle se pourrait tenir assurée de mon amitié et de ma considération parfaite, et qu'elle aurait trop bonne opinion de moi pour ajouter la moindre foi à toutes ces avances et discours ridicules que le marquis de Botta2 a tenus à ses amies; que je les déteste, et que mon amitié serait inaltérable envers l'Impératrice.

Vous pouvez même insinuer à Sa Majesté Impériale ou à Lestocq, quoique avec assez de secret et de circonspection, et seulement de bouche, que, selon mon avis, il n'y a de meilleur parti à prendre pour elle que d'envoyer le prince Iwan dans quelque partie de la Sibérie où il serait nullement connu, de mettre la Princesse sa mère dans un couvent, et de renvoyer le Prince son mari en Allemagne; que c'est le seul moyen où le crime n'entre point, et par lequel l'Impératrice se mettrait à couvert contre des trames et des brigues qui, sans cela, ne finiraient jamais, et qui pourraient devenir à la fin fatales à l'Impératrice; que c'est l'avis du meilleur ami de l'Impératrice et de la Russie, qui en espère pourtant le retour d'une amitié parfaite de la part de l'Impératrice, et qu'elle voudrait bien ménager cet avis. Outre cela, vous tâcherez de gagner à l'heure qu'il est le ministère par



1 Mit der Nachricht von der Entdeckung einer Palastverschwörung zu Gunsten des entthrontcn Kaiser Iwan. Vergl. Droysen V, 2, 149.

2 Der nach der Aussage der Verhafteten während seiner Mission in Russland den Unzufriedenen Aussichten auf preussische Unterstützung eröffnet haben sollte.