7024. [PROJETS D'UNE LETTRE A ÉCRIRE AU DUC DE BRUNSWICK].

Schreiben des regierenden Herzogs von Braunschweig, Braunschweig 8. October 1755: „Sire. Un courrier anglais m'apporta hier la ci-jointe lettre, par laquelle le lord Holdernesse a accompagné la déduction qu'il souhaite d'être présentée à Votre Majesté330-5 de même qu'une carte de l'Amérique septentrionale. Il a, dans l'autre lettre aussi jointe, répondu séparément sur la confidence que je lui avais faite dans les termes relationnés à Votre Majesté,330-6 ce qui me fait croire qu'il ne soupçonne rien que tout ce que je lui ai écrit, ne soit pas de mon propre mouvement.

Après lui avoir promis d'avoir soin de ses déductions et de la carte, comme aussi que, d'abord que je serais informé de sentiments de Votre Majesté sur tout ceci, je ne tarderais pas d'en donner part, je lui réponds par rapport à la seconde lettre : «  que je n'étais ni assez au fait, ni assez hardi quelles pourraient être les propositions que Votre Majesté juge acceptables, que bien d'indices me faisaient cependant croire qu'il y en ait des conditions qui pourraient convenir à Votre Majesté. »

Je souhaite que ce soit conforme aux intentions et volontés de Votre Majesté, desquelles j'attends la direction de mes démarches ultérieures.

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Du mariage il n'y a, depuis le départ du roi d'Angleterre, rien de plus;331-1 les ministres d'Hanovre continuent de donner des espérances générales.

C'est avec la reconnaissance la plus vive et la vénération la plus parfaite que je suis, Sire, de Votre Majesté le très humble, très obéissant et tout-à-fait dévoué frère et serviteur

Charles.

Whitehall, 30 septembre 1755.

Monseigneur. La lettre dont Votre Altesse Sérénissime a daigné m'honorer, en date le 5 du courant, m'a été remise par Monseigneur le prince Louis, quand j'eus l'honneur de lui faire ma cour, à mon passage par la Hollande. Je n'ai pas manqué de la montrer au Roi, d'abord après l'arrivée de Sa Majesté à Helvœtsluys, où je reçus ses ordres de différer d'y répondre, jusqu'à ce que je me visse en état d'envoyer à Votre Altesse Sérénissime un détail circonstancié des disputes survenues avec la France en Amérique. Dès mon arrivée en Angleterre, j'ai commencé à y travailler; mais le détail en est si gros et les documents à examiner si volumineux que ce n'est qu'aujourd'hui que j'ai pu la finir. J'ai l'honneur de l'envoyer ci-jointe à Votre Altesse Sérénissime, en La priant au nom du Roi de la faire parvenir à Sa Majesté Prussienne. Je me flatte qu'elle y trouvera un contraste bien marqué entre les injustices et les violences de la France et la modération invariable du Roi. Sa Majesté a vu avec un sensible plaisir que le roi de Prusse continuait à s'expliquer favorablement pour l'entretien de la paix générale en Europe et surtout du repos de l'Empire. La continuation de ces sentiments pourra effectuer un évènement si désirable, comme il n'est point à présumer qu'aucune puissance voulût commencer des actes d'hostilité en Allemagne, sans être préalablement assurée du soutien de Sa Majesté Prussienne; mais il aurait été à souhaiter que Sadite Majesté se fût expliquée plus clairement sur ce qui regarde les États allemands du Roi, en cas que, contre toute justice, on voulût inquiéter le Roi en Allemagne, en conséquence des démêlés purement anglais. Je dois donc, par ordre du Roi, réitérer mes instances auprès de Votre Altesse Sérénissime qu'Elle veuille derechef tâcher d'induire Sa Majesté Prussienne à l'explication en question, et Votre Altesse Sérénissime peut S'assurer de la sincérité avec laquelle le Roi y répondra.

J'ai l'honneur d'être avec le plus profond respect, Monseigneur, de Votre Altesse Sérénissime le très humble, très obéissant serviteur

Holdernesse.

J'ai pris la liberté d'ajouter une carte de l'Amérique septentrionale pour l'usage de Sa Majesté Prussienne.

Whitehall, 30 septembre 1755.

Monseigneur. La façon ouverte et confidentielle dont Votre Altesse Sérénissime a daigné S'expliquer envers moi, exige de ma part la plus vive reconnaissance, et je me flatte qu'Elle voudra bien me permettre de m'ouvrir, de mon côté, avec la même franchise dans cette lettre particulière sur les conjectures que Votre Altesse Sérénissime a formées des intentions de Sa Majesté Prussienne sur l'objet de la neutralité des États allemands du Roi.

Par les pièces que j'ai eu l'honneur de communiquer à Sa Majesté Prussienne, elle jugera de la justice et même de la modération du procédé du Roi envers la cour de France dans les différends survenus avec cette couronne en Amérique, et que c'est la France elle-même qui a commencé les hostilités dans cette partie du monde, en envahissant une province dont la possession était décidée en faveur du Roi et dont on réglait actuellement les limites, en saisissant par force ouverte et en fortifiant un pays dont le Roi était en possession, et où la France n'a jamais prétendu même avoir le moindre droit, avant l'année 1750, et en attaquant un fort érigé par ordre de Sa<332> Majesté dans son propre territoire. Mais, queue que soit l'idée que l'on puisse se former des affaires d'Amérique et de leurs suites par rapport à l'Angleterre, il est constant que rien ne peut égaler l'injustice de vouloir y impliquer le Roi comme électeur, et le Roi est trop assuré de l'attachement dévoué de tous ses sujets pour pouvoir douter qu'il ne se trouve efficacement soutenu par la nation anglaise dans une pareille conjoncture. Les conséquences en seront toujours fâcheuses. Le roi de Prusse est certainement en état de les prévenir et se concilierait, par ce moyen, l'amitié du Roi et l'affection de la nation anglaise, pour laquelle Sa Majesté Prussienne a toujours témoigné de l'estime, et le roi de Prusse pourrait aussi, en conservant la paix, agir autant pour sa gloire qu'il a jamais fait jusqu'ici par le succès le plus brillant de ses armes, et se verrait assurée par là la tranquille possession du fruit de ses victoires passées.

Je l'avouerai, Monseigneur, que mon entière ignorance de ce que le roi de Prusse pourrait croire « proposition acceptable »,332-1 m'a empêché jusqu'ici de toucher cette corde-là; mais j'ai lieu de croire que, si le roi de Prusse voulait bien s'expliquer ouvertement en faveur de la neutralité d'Hanovre et sur l'entretien de la paix en Allemagne, on choisirait un ministre anglais de confiance, et qui ne serait pas désagréable à Sa Majesté Prussienne, pour cette négociation, qui pourra se terminer à Berlin sous les yeux même du roi de Prusse.

J'ai l'honneur d'être avec le plus profond respect, Monseigneur, de Votre Altesse Sérénissime le très humble, très obéissant serviteur

Holdernesse.

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Projet d'une lettre écrite avec ouverture au Duc.

J'ai reçu la déduction que vous m'envoyez des différends que les Français et Anglais ont en Amérique. Il est bien difficile de décider entre deux puissantes nations, et c'est à Dieu, qui est le seul juge des rois, à connaître de leur cause; pour moi, je me renferme dans ma sphère, et je fais des vœux pour que cette guerre, si étrangère aux intérêts de l'Allemagne, ne s'y communique pas. Vous me parlez de propositions que les Anglais voudraient me faire, pour qu'en cas de guerre je promisse de maintenir ou de contribuer à la neutralité du pays d'Hanovre. Quant à mon personnel, je la promettrais dès aujourd'hui, cette neutralité; car, vous qui connaissez ma façon de penser, vous savez que je n'ai point le dessein d'empiéter sur mes voisins et

Projet de lettre moins naturelle et plus circonspecte.

J'ai reçu la pièce que vous avez eu la bonté de m'envoyer touchant les démêlés des Anglais et des Français au Nouveau Monde; c'est de ces deux déductions qu'on peut dire: « Je ne décide point entre Genève et Rome »; c'est à Dieu seul à connaître de la justice de cette cause, il est le seul juge des rois.

Vous me marquez en même temps que les Anglais vous ont fait des ouvertures pour savoir ma façon de penser sur cette guerre, et qu'ils pourraient même exiger de moi la neutralité de l'Allemagne, Vous me connaissez assez pour savoir que personne ne la désire plus que moi, et que, si j'y peux contribuer, sans me brouiller avec mes alliés, je le ferai avec le plus grand empressement, d'autant que

que je n'ai jamais eu dessein direct ni indirect sur les États du roi d'Angleterre en Allemagne, je crois même d'avoir empêché, l'année 1741, que l'armée de Maillebois s'en emparât.333-1 Il ne s'ensuit pas de là que j'aurai la même influence sur les résolutions des Français qu'alors, de sorte que je vous avoue que ces propositions m'embarrassent d'autant plus que je ne me saurais brouiller avec un allié comme le roi de France pour l'amour de gens avec lesquels j'ai actuellement deux démêlés qui ne sont que suspendus, l'un avec les Anglais touchant la déprédation de quelques vaisseaux marchands prussiens,333-2 l'autre avec les Hanovriens touchant les droits imaginaires qu'ils s'attribuent sur l'Ostfrise, affaire dans laquelle ils ont agi très peu aimablement envers moi à Ratisbonne.333-3 J'ai témoigné assez de modération jusqu'à présent dans ces affaires-là; ce n'est pas à dire non plus que cela fût assez fort pour occasionner une rupture de ma part, à laquelle je ne me résoudrai envers tous ceux qui se déclareront mes ennemis, que le plus tard qu'il se pourra; mais, à parler à cœur ouvert, que me veut-on? Que je quitte des alliés dont je n'ai point à me plaindre? Pour qui? Pour une puissance avec laquelle je ne sais actuellement pas si je suis bien °u mal. Qu'on me demande ma neutralité pour moi; assurément, je téponds à cela que l'on n'a pas besoin de la demander, et que personne n'évitera plus la guerre que moi, à moins que ma situation

nos engagements ne sont point offensifs; d'ailleurs, il règne un sens énigmatique dans ces propositions des Anglais que je n'ai pu pénétrer jusqu'à présent; je ne sais ce que l'on veut de moi, il faut s'expliquer clairement et ne point demander des choses contraires aux engagements dans lesquels je suis; si l'on me demande des choses compatibles avec les liaisons que j'ai contractées, je me ferai un plaisir d'obliger le roi d'Angleterre. Quant à mon personnel, il peut être persuadé que je serai charmé de lui en donner des marques, il peut être sûr que jamais je n'ai pensé ni formé le dessein de troubler ses possessions allemandes, et que, quant à ce qui me regarde, je ferai ce qui dépendra de moi pour maintenir la paix, à moins qu'il n'arrive des évènements que je ne saurais prévoir à présent, et qui me mettraient dans un plus grand risque en restant dans l'inaction qu'en agissant, et, si ce que je vous dis, ne suffit point à ceux qui vous ont fait ces insinuations, il ne dépend que d'eux de s'expliquer plus clairement.

propre ne devienne si dangereuse que je risque plus en conservant la paix qu'en faisant la guerre. Ainsi, mon cher Duc, tout ce que vous me marquez que vous ont écrit les Anglais, est si vague que je ne sais en vérité qu'y répondre; si c'est leur sérieux et qu'ils veuillent se réconcilier avec moi, je crois qu'ils parleront d'une façon plus intelligible et moins en style d'oracle etc.

Je ne saurais deviner les pensées des autres; si c'est leur sérieux et qu'ils aient réellement quelque chose à me dire, soyez persuadé qu'ils s'expliqueront plus clairement, si non, je dois croire qu'ils n'ont en vue que de nous amuser tous les deux.

Die Projets eigenhändig. Das Schreiben des Herzogs mit den Beilagen nach der Ausfertigung.



330-5 Vergl. S. 272.

330-6 Vergl S. 287.

331-1 Vergl. S. 303.

332-1 Vergl. S. 287.

333-1 Vergl. Bd. I, 364.

333-2 Vergl. Bd. IX, 479; X, 528.

333-3 Vergl. Bd. IX, 484; X, 535.