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Les intérêts de la Hollande sont d'être unie avec les puissances protestantes, d'avoir une barrière qui lui serve de défense contre les entreprises qu'un esprit d'ambition pourrait susciter à la France, et de maintenir son commerce; comment donc est-ce que la Hollande verrat-elle de sang-froid le duché de Clèves envahi par les Français, l'électoral d'Hanovre abîmé et les deux colonnes du protestantisme écrasées par des ennemis qui l'entourent de tous côtés et qui n'attendent pour la subjuguer que d'avoir terrassé ces deux rois? Il est bien sûr que ces objets sont trop frappants pour ne point être aperçus par des personnes sensées; mais comme dans les républiques il se trouve beaucoup de membres qui préfèrent leur bien personnel, l'on croit qu'il ne serait pas impossible de flatter la République, en ayant quelque indulgence pour la contrebande des particuliers1 en faveur des grands services que l'on tirerait de leurs2 secours. L'on croit même qu'il ne serait pas hors de propos de lui stipuler dans le traité que l'on pourrait faire avec elle, une nouvelle barrière qui consisterait dans les villes d'Ostende, Bruges, Gand, Anvers et Malines, dont le Dendre ferait la frontière, ce qui communiquerait avec Mastricht. En considérant les sommes qui sont' dues à la République par la maison d'Autriche,3 et le subside que, selon le traité de la Barrière,4 elle est obligée de leur5 payer, l'on trouvera que cette nouvelle lisière ne les dédommage pas entièrement des sommes qui lui sont dues.

Le moment présent paraît tout aussi favorable pour se lier avec le Danemark. L'on sait sans doute les prétentions et les démêlés que cette cour [a] à présent pour la coadjutorerie de Lübeck,6 et l'on croit qu'il serait possible d'en profiter.

Quant à la terre ferme, on a joint à ce mémoire un projet de campagne7 pour l'armée alliée en Westphalie, mais l'on observe en même temps que, si l'on ne veut pas se trouver dans le cas de Minorque, il ne faut pas perdre un moment pour prendre tous les arrangements nécessaires pour l'assemblée de cette armée, surtout pour la formation des magasins. On ajoute à ce que l'on a dit dans ce projet, qu'il est de la plus grande conséquence de prendre sur ce sujet des résolutions promptes et décisives; que, si la ville de Wésel est emportée, l'électorat d'Hanovre courra grand risque, et que, si une fois les Français s'en rendent maîtres, l'on ne voit pas le moyen de les en chasser alors.

Pour la Prusse, elle prend des mesures, dès ce moment même, pour s'opposer à ses ennemis, dont le nombre cependant grossit de jour en jour. Elle se trouve encore dans l'incertitude sur ce qu'elle doit attendre des Russes. Quoique l'on ait quelques faibles lueurs d'espérance de ce



1 Vergl. Bd. XIII, 579.

2 In der Ausfertigung: „ses secours“ .

3 Vergl. Bd. XI, 219.

4 Artikel 19 des Barrierevertrags vom 15. November 1715; Dumont, Corps diplomatique VIII, p. I, 462.

5 Scil. aux États-Généraux.

6 Vergl. S. 61.

7 Nr. 8354.