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8973. AU DUC DE CUMBERLAND A BIELEFELD.

[Au camp de Prague,] 21 mai 1757.

Monsieur mon Frère et Cousin. L'approbation que Votre Altesse Royale1 donne aux avantages que mes troupes ont remportés sur les Autrichiens, m'est d'autant plus flatteuse que vous êtes juge compétent dans ces matières.

Pour vous informer ultérieurement de ce qui s'est passé ici, Votre Altesse Royale saura que la plus grande partie de l'armée autrichienne s'est jetée dans Prague, consistant selon mes nouvelles en 6 régiments de cavalerie et en 33 régiments d'infanterie dont la moitié sont délabrés, de sorte que l'on évalue la garnison à passé 35,000 hommes.

Environ 8000 fuyards de la droite de leur armée, poursuivis par mes troupes, sont passés la Sazawa, ils ont marché sur Beneschau, ils ont ensuite repassé la Sazawa du côté de Sternberg pour se joindre au maréchal Daun. Celui-là se trouva le jour de l'action à Bcehmisch-Brod, et, sur la nouvelle du malheur arrivé aux Autrichiens, il se retira sur Nimburg. Je détachai sur-le-champ le prince de Bevern pour le talonner, il l'a poussé jusqu'à Czaslau, et je crois qu'on pourra le rejeter encore plus loin en arrière, j'apprends même qu'il a envoyé son bagage à Iglau.2

J'ai employé ce temps à faire investir la ville de Prague de tous côtés, j'ai fortifié tous mes postes avec des redoutes, et comme les collines qui dominent la ville, m'ont procuré le moyen d'en approcher d'assez près, je me trouve dans trois points de ma circonvallation à 700 pas de la ville.

Si Prague n'était défendue que par 10 ou 12,000 hommes, il me serait facile de la prendre par un siège régulier, mais je ne pense pas qu'il soit expédient d'ouvrir la tranchée devant une armée de 40,000 hommes.

Je sais que les magasins n'y sont pas trop fournis, quoiqu'au juste je ne puisse point apprendre encore pour combien les mènera leur farine. Je sais que leurs chevaux meurent au piquet, faute de fourrage, que la viande y manque, et qu'ils ont plusieurs besoins qu'ils cachent soigneusement; ils sont sortis deux fois de la ville pour percer au travers de nous autres, mais les premiers bataillons sortis ont aussitôt reçu ordre de se retirer. Dans ces circonstances, je ne vois aucun meilleur moyen que de ruiner par les bombes leurs magasins, leurs moulins et leurs boulangeries. Ma grosse artillerie doit arriver demain ou après-demain, l'on construit actuellement les batteries,3 et dès que tout sera arrangé, j'espère de les forcer à sortir malgré eux ou à se rendre avec ignominie, ce que l'on ne doit pas présumer de braves gens.



1 Schreiben des Herzogs von Cumberland, d. d. Bielefeld 16. Mai, von Mitchell am ai. Mai überreicht. Vergl. Nr. 8974.

2 Vergl. S. 52. 64.

3 Vergl. Nr. 8968.